Que s'est-il passé le 30 mars 1349 ?

Petit rappel historique :

L'empire de Charlemagne à cette époque couvre toute la France métropolitaine actuelle, excepté la Bretagne, s'étend au sud-ouest jusqu'à Barcelone, au sud-est jusqu'à Rome, au nord jusqu'à l'actuelle frontière germano-danoise et à l'est il englobe l'actuelle Autriche avec la Suisse. Charlemagne, à sa mort, le 28 janvier 814, lègue à son fils, Louis le Pieux ou « le Débonnaire » son immense territoire. Son règne est marqué par de nombreuses menaces sur l'unité de l'Empire carolingien. Ses fils se révoltent contre lui, et il doit faire face aux raids des Vikings. Durant cette période, les ambitions des aristocrates s'affirment de plus en plus, menaçant le pouvoir impérial. Depuis le mois d'août 843, date du traité de Verdun, ce qui sera plus tard la province du Dauphiné fait partie de la Francie médiane dirigé par Lothaire 1^er, fils de Louis le Pieux et petit-fils de Charlemagne. La Francie médiane prit plus tard de nom de Saint Empire Germanique. Peu de temps avant sa mort Lothaire 1^er partage son royaume. C'est le début d'un morcellement qui perdura plusieurs siècles avant de se reformer.

Le Dauphiné :

La conception de notre province mérite à elle seule un livre, je vais essayer d'en résumer rapidement la construction. C'est l'œuvre des Dauphins, comtes d'Albon. A l'origine l'ancêtre, Wigo Comes, influent et riche propriétaire d'un domaine du Vivarais vers Vion. Les premiers Guigues sont connus par des textes de 996 dans lesquels leurs liens de parenté avec les évêques de Grenoble et Valence sont cités. Leurs possessions à cette époque sont vers Albon au sud de Vienne et à Vizille où ils possèdent un château, un village et une église.

Albon, berceau du Dauphiné :

Le château d'Albon est encore visible aujourd'hui sous la forme d'une tour carrée sur motte. Il était autrefois accompagné d'une basse-cour et d'un bourg castral protégé par une enceinte qui le reliait directement au château. Il est situé à l'est de Saint-Romain-d'Albon, sur la commune d'Albon (voir en fin d'article les dernières découvertes archéologiques). Il était le chef-lieu du mandement d'Albon au Moyen Âge, s'étendant sur les actuelles communes d'Albon, d'Andancette, d'Anneyron et de Saint-Rambert-d'Albon. Le siège du pouvoir s'est déplacé de Saint-Romain-d'Albon où se trouvait un important établissement gallo-romain vers le site perché de la Tour aux environs du Xe siècle.

Les Guigues, fondateurs de la province du Dauphiné :

Je me contenterai dans cet article d'énumérer la suite chronologique des Comtes d'Albon appelés Dauphins à partir du XI^e siècle. Les détails sur la vie de chaque « Dauphin » feront l'objet d'articles plus conséquents. Ci-dessous, vous trouverez le nom, les dates (naissance, décès, années de règne), mariage(s) et principaux faits marquants.

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Guigues I^er Veteris (le Vieux), (fils de Wigo Comes appelé aussi Guigues d'Albon et de Gotelana de Clérieux) : né vers 1000, mort le 22 avril 1070 à Cluny. Il règne de 1016 à 1070. Il épouse une Adélaïde, qui semble être de la famille des comtes de Turin, et a eu un fils : Guigues II. Les nouvelles recherches n'en font désormais qu'un ambitieux qui étend son domaine entre Rhône et cols alpins : Moirans (1016), le Champsaur (1027), l'Oisans (1035), le Grésivaudan (vers 1050), le Briançonnais (vers 1053) et la vallée d'Oulx en Italie actuelle (1070). On ne sait pas comment les Guigues ont pris possession de ces terres, mais leur puissance naissante leur permet déjà d'imposer des membres de leur famille comme évêque, et donc de piller et d'aliéner les biens d'église à leur profit : l'oncle de Guigues est évêque de Grenoble et succède à Isarn. L'épiscopat passera ensuite à son cousin Mallen. Son frère est évêque de Valence et l'archevêché de Vienne, charge d'église la plus prestigieuse de la province, est aux mains d'un cousin par alliance ! Tout au long du XI^e siècle, c'est toujours le fils aîné, prénommé Humbert, qui est voué à devenir évêque ; le second fils, toujours prénommé Guigues, est lui destiné à hériter des biens laïcs. Mallen est sans doute celui qui a systématisé le transfert des biens d'église vers son cousin Guigues.

Guigues II Pinguis (le Gras) : né vers 1020, mort en 1079. Il règne de 1070 à 1079. Il a épousé 27 avril 1050 Pétronille de Royans dont il eut Guigues III et Adélaïde. En secondes noces, il a épousé Agnès de Barcelone en 1170, la fille du comte de Barcelone, dont il eut Guigues-Raymond d'Albon. Ce remariage lui permet d'étendre son influence jusqu'aux rives de la Méditerranée. Il se contente d'arrondir son domaine proche.

Guigues III (Comes) : né entre 1050 et 1060, mort en 1133. Il règne de 1079 à 1133. Il épouse en 1095 Mathilde qui semble être la fille de Roger Ier, comte de Sicile et de Pouille et d'Adelaïde de Savone. En secondes noces, il épouse Eremburge de Mortain. Il eut cinq enfants : Guigues IV, Humbert, Gersende, Mathilde d'Albon et Béatrice d'Albon. Saint Hugues lui fait reconnaître le partage des pouvoirs temporels et ecclésiastiques sur Grenoble. En 1129, il bénéficia du partage du comté du Viennois qui se fit entre le comte d'Albon et le comte de Savoie.

Guigues IV (le Dauphin) : né vers 1095, mort en 1142. Il règne de 1133 à 1142. Il épouse Marguerite de Bourgogne ou de Macon, la nièce du pape Calixte apparentée à l'Empereur Frédéric Barberousse. Il a eu trois enfants : Guigues V d'Albon, Béatrice d'Albon, Marquise d'Albon. Il saccage la ville de Romans. Il lutte contre la Savoie, il meurt à La Buissière au cours du siège de Montmélian.

Guigues V : né vers 1125, mort le 29 juillet 1162 à Vizille. Il règne de 1142 à 1162. Il épouse Béatrice de Montferrat. Il n'a eut qu'une seule fille Béatrice d'Albon. Trop jeune à la mort de son père, il laisse la régence des domaines à sa mère Clémence. L'Empereur le nomme Comte du palais de Vienne. Le 13 janvier 1155, Guigues V reconnaît à Rivoli près de Turin la suzeraineté de l'empereur germanique Frédéric Barberousse qui en échange l'arme Chevalier et lui confirme la possession des terres que les précédents comtes d'Albon avaient acquises de manière litigieuse. Il lui accorde en outre une mine d'argent à Rame dans l'Embrunais et le droit de battre monnaie à Cézanne.

Béatrice d'Albon : née en 1161, morte le 16 décembre 1228 au château de Vizille. Elle règne de 1162 à 1228. Son père étant mort alors qu'elle n'avait qu'un an, ce fut sa grand-mère Clémence de Bourgogne qui assura la régence, le temps de lui trouver un époux. Elle y parvint à temps, puisque Béatrice est mariée en 1164 (elle a trois ans !) avec Albéric Taillefer de Toulouse (1157-1183), second fils de Raymond V, comte de Toulouse et de Constance de France. Le jeune époux n'a que sept ans, mais c'est le neveu du roi Louis VII de France. On voit s'amorcer un rapprochement du Dauphiné, terre d'Empire, avec le royaume de France. Clémence de Bourgogne étant décédée en 1164, c'est Béatrice de Montferrat, la mère de Béatrice, qui assure la régence à son tour. Albéric Taillefer meurt sans postérité en 1183, et Béatrice se remarie immédiatement avec un autre vassal du roi de France, Hugues III, duc de Bourgogne. Ils auront trois enfants : André Guigues VI, Mahaut, Anne. Hugues III prend part à la troisième croisade et meurt à Tyr. Béatrice épouse alors en 1193 un petit seigneur de Bresse, Hugues I^er, seigneur de Coligny. Ils auront deux enfants : Béatrice, mariée à Albert IV, seigneur de la Tour du Pin, leur fils Humbert de la Tour du Pin épousera sa cousine Anne, petite fille de Guigues VI, et deviendra dauphin du Viennois. Le second enfant se prénomme Marie.

Passation de la Maison d'Albon à la Maison de Bourgogne. Le Viennois, le Grésivaudan et le Briançonnais constitue l'ébauche du Dauphiné.

André Dauphin Guigues VI : né en 1184, mort le 14 mars 1237. Il règne de 1228 à 1237. Il épouse en premières noces en 1202 Béatrice de Sabran, comtesse de Gap et d'Embrun. Il a un enfant : Béatrice de Viennois. Ils se séparent en 1215 et il se marie en secondes noces le 15 novembre 1219 avec Béatrice de Montferrat dont il a deux enfants : Guigues VII, Jean. Il hérita de sa mère et prit le prénom de Guigues en mémoire des précédents dauphins. Il fit des donations à plusieurs monastères. Prudent et mesuré comme sa mère, il utilisa plus souvent la diplomatie que la force pour agrandir ses états.

Guigues VII : né en 1225, mort en 1269. Il règne de 1237 à 1269. Il épouse en 1253 Béatrice de Faucigny. Il a trois enfants : Jean I^er, André et Anne. Béatrice lui apporta en dot le Faucigny, une terre éloignée de Dauphiné et menaçante pour la Savoie, l'ennemi héréditaire. Un certain nombre de futurs conflits entre les deux voisins auront pour objet cette terre.

Jean I^er : né en 1264, mort à Bonneville le 24 septembre 1282 d'une chute de cheval. Il règne de 1269 à 1282. Âgé de cinq ans à la mort de son père, ce fut sa mère qui prit la régence. Il épouse en 1280 Bonne de Savoie. Il mourut deux ans plus tard, sans avoir eu d'enfant.

Passation de la Maison de Bourgogne à la Maison de La Tour du Pin.

Humbert I^er : né vers 1240, mort le 12 avril 1307, fut un baron de la Tour-du-Pin, avant de devenir, par mariage, dauphin de Viennois. Il était fils d'Albert III, baron de la Tour-du-Pin, et de Béatrice de Coligny. Sa mère était elle-même fille d'Hugues Ier, seigneur de Coligny, et de Béatrice d'Albon, dauphine de Viennois. Humbert devient dauphin en 1282 à la mort de son beau-frère Jean I^er. Il épouse en 1273 Anne de Bourgogne, fille de Guigues VII et de Béatrice de Savoie. Il a neuf enfants : Jean II, Hugues, Guigues, Alix, Marie, Marguerite, Béatrice, Henri, Catherine. Pour avoir entrepris des expéditions guerrières contre le comte de Savoie et avoir accablé ses sujets de péages abusifs, Humbert tombera sous le coup d'une triple excommunication. Ceci ne l'empêchera pas de finir sa vie à la chartreuse de Val Sainte Marie en 1306 en laissant le pouvoir à son fils Jean.

Jean II : né vers 1280, mort le 5 mars 1319 au Pont de Sorgues, près d'Avignon. Il règne de 1306 à 1318. Il épouse en 1296 Béatrice de Hongrie, fille de Charles Martel, roi titulaire de Hongrie, et de Clémence de Habsbourg. Il a deux enfants : Guigues VIII, Humbert II. L'œuvre politique principale de ce dauphin est de jalonner la frontière delphino-savoyarde de villes neuves fortifiées pour renforcer sa défense. Jean II veut utiliser la trêve entre Dauphiné et Savoie pour renforcer une frontière qui n'était jusque-là défendue que par des arbres.

Guigues VIII : né en 1309, mort le 28 juillet 1333. Il règne de 1318 à 1333. Il épouse Isabelle, fille du Roi Philippe V le Long (roi de France). C'est un enfant de neuf ans quand son père meurt en 1318. La régence est assurée par Henri Dauphin, évêque élu de Metz, son grand oncle, jusqu'en 1323. Chevalier et combattant hors pair, il remporte en 1325 à Varey, près de Pont d'Ain, une victoire éclatante contre les Savoyards alors qu'il n'est âgé que de seize ans et qu'il est encore sous la tutelle de son grand oncle. Les chroniques du temps nous disent que « l'ost de Savoye fut bellement desconfit ». Suite à cette bataille, Guigues sera en conflit quasi permanent avec son voisin savoyard et son ardeur au combat lui sera fatale lors du siège du château savoyard de la Perrière en 1333, en ne laissant aucune descendance.

Humbert II : né en 1312, mort en 1355. Il règne de1333 à 1349. Il épouse ????. Il a un fils André. Sévèrement jugé par ses contemporains comme un incapable et un dépensier, Humbert II est le dernier dauphin de Viennois. N'ayant pas l'ardeur guerrière de son frère, il se range plutôt dans le camp des pacifiques. Ayant passé sa jeunesse à la cour de Naples, il entretient une cour fastueuse à Beauvoir-en-Royans ce qui est mal perçu par ses frustes contemporains. Afin de mener une croisade en Terre sainte, quarante ans après le départ des derniers chrétiens de Saint-Jean-d'Acre, il vide les caisses de son trésor.
Après la perte de son fils unique André, Humbert abandonne vite l'espoir d'avoir une descendance et projette dès 1337 de céder son héritage. Les difficultés financières s'accumulant, Humbert fait procéder à l'inventaire de ses biens en 1339 dans le but de vendre sa principauté au pape Benoît XII. La transaction avec le pape ayant échoué, c'est finalement au roi de France Philippe VI de Valois que le Dauphiné est cédé en 1349. Le transport (qui est le nom donné à la cession pour sauver les apparences) avait été décidé depuis 1343, mais son désir de croisade pousse Humbert II à accélérer le processus.

Pour s'assurer que le Dauphiné, devenant fief du fils aîné du roi de France, ne soit pas assimilé à n'importe quel autre domaine du souverain, Humbert signe le 30 mars 1349 le traité de Romans avec le royaume de France. Ce traité instaure le "Statut delphinal", ce qui exempte les Dauphinois de nombreuses taxes et impôts. La défense de cette constitution particulière sera l'objet principal des discussions du parlement provincial dans les siècles qui suivirent. Après la cession du Dauphiné, Humbert entre dans l'Ordre des Prêcheurs de Lyon où il prend l'habit de saint Dominique et aspire à devenir évêque de Paris, voire pape lorsqu'il meurt à 43 ans en 1355.

Cette date du 30 mars 1349 marque donc l'entrée de notre village dans le Royaume de France. Mais les traditions ont la dent dure, pour preuve cette coutume des mariniers du Rhône qui le descendaient sur des radeaux de bois. A cette époque avant 1349 et même au-delà, les « capitaines » de ces embarcations ordonnaient à leurs hommes d'équipage non pas d'aller à droite ou à gauche mais plutôt « de pousser à l'empie (rive gauche du Rhône Saint Empire Germanique) ou de pousser au riaume (rive droite du Rhône Royaume de France).

Fêtons ce 30 mars dont c'est cette année marque le 660^e anniversaire. Pourquoi ne pas décider que l'assemblée générale de notre association ne se déroule dans les années à venir, le samedi le plus proche de cette date ? Qu'en pensez-vous ? J'attends vos commentaires sur ce blog.

Les dernières fouilles archéologiques vers de la Tour d'Albon :

En 1995, on découvre un bâtiment à caractère monumental, à usage résidentiel, dans la basse-cour de la motte, datant du XI^e siècle.

En 1996-1997 est découvert un édifice religieux, agrandi au XIII^e siècle.

B.P.

Source : L'encyclopédie libre Wikipedia et l'atelier des Dauphins

Que s'est-il passé le 30 mars 1349 ? Petit rappel

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