La borne romaine milliaire de Chanas La fontaine
La borne romaine milliaire de Chanas
La fontaine principale de Chanas, appelée communément « Fontaine du Pèlerin » est composée d’un bassin circulaire adossé à une pierre supportant une croix. La partie basse du fût est en fait une borne « kilométrique » datant de l’époque gallo-romaine.
Assurément le « monument » le plus connu des Chanasiens et pour être le plus ancien répertorié, il a été en fait découvert en 1627.
1627 : C’est pendant le règne de Louis XIII avec Richelieu. Celui-ci vient d’entrer au conseil du roi et deviendra le Principal Ministre deux ans plus tard.
Mais qu’est-ce qu’une borne milliaire du temps des Romains ?
Le terme "milliaire" est employé pour qualifier les bornes ou colonnes itinéraires romaines. Cette dénomination globale n'est pas toujours justifiée.
- Ces bornes indiquaient des distances en "milles" romains. Il est vraisemblable qu'il y ait eu une borne tous les milles romains, comme actuellement avec nos bornes kilométriques que ce soient sur routes ou autoroutes ; ces repères étaient également placées à des endroits spécifiques : carrefours, agglomérations, ponts, gués, monuments, frontières provinciales, ...).
Mille pour mille pas.
Imaginez qu’à cette époque le mille romain équivalait à 1 481 de nos mètres actuels. Ce qui signifie qu’un pas mesurait 1,48 m ! Etant donné que les hommes vivant à cette époque étaient de taille moyenne inférieure à la notre actuellement tout porte à croire que cette unité de base était un double-pas, ce qui ramènerait à 0,74 m 2,5 pieds 1 482 m
L’abréviation sur les bornes milliaires est M P pour millia passuum bien que n’apparaissant pas systématiquement sur celles-ci.
On notera également que cette unité de mesure n’était plus de rigueur dans les territoires situés plus au nord dans la Gaule Chevelue où la lieue romaine, de 2 220 mètres 2 415 mètres
Mais revenons à « notre » borne. Pour ceux qui voudraient plus de renseignements sur les bornes milliaires, j’indiquerais plusieurs sites web en fin d’article.
Découverte en 1627, mais pas à la place actuelle qu’elle occupe puisque les différentes notes, que j’ai pu recueillir à ce propos, sont unanimes sur ce point. Elle a été déplacé de trois kilomètres au sud de son emplacement d’origine, ce qui sensiblement la situe sur l’actuelle route nationale 7 (tracé le plus plausible de la Via Agrippa qui va de Viennes en Arles sur lequel j’attends des confirmations et qui donnera lieu prochainement à un article dans ce blog) et correspond entre les zones commerciales Jonchain nord et sud de Salaise-sur-Sanne vers les feux tricolores du carrefour de l’axe « Gédimat/Le Faillitaire ». Pourquoi ce déplacement ? Je n’ai actuellement aucun élément permettant de l’expliquer, mais l’on peut supposer que celui-ci se soit déroulé lors de journées de corvée requises pour la remise en état de la voie royale de l’époque.
Description de la borne milliaire de Chanas
En calcaire de forme cylindrique, étant la forme plus répandue à l’époque, elle mesure 1,50 m 58 cm 1912. A
Le cimetière à cette époque comme dans beaucoup de paroisses se situait autour de l’église. Pour exemple : le cimetière de Roussillon et celui du hameau de Ville de la commune de Ville-sous-Anjou. A noter que dans ce dernier, et là aussi c’était la coutume à l’époque, les gens les plus pieux (sous-entendu qui faisaient des dons honorables à l’Eglise) avaient leur tombe contre le mur même de l’église et que les nobles ou seigneurs locaux étaient eux enterrés à l’intérieur de l’église. Donc à cette période le cimetière se trouvait de part et d’autre de l’église et « notre » borne milliaire en son milieu.
L’inscription
On a rien inventé avec les SMS et autres texto car voici l’inscription telle que relevée sur la borne milliaire de Chanas.
LIO HADRIANO ANTONINAVG PIO .
PPPMTRIB P VII .
CS XIIII
Vu les moyens de l’époque employés par les graveurs de pierre, ces derniers avaient développé des contractions nominales pour limiter la frappe. Exemple : AV se gravait avec la barre oblique de droite du A était commun à la barre oblique de gauche du V. Quelques deux mille ans plus tard l’on aperçoit cette contraction sur une affichette collée sur la lunette arrière d’une voiture A VENDRE.
L’inscription développée en latin signifie d’après plusieurs chercheurs :
IMPERATORI CAESARI TITO AELIO
HADRIANO ANTONINO AUGUSTO PIO,
PATER PATRIAE, PONTIFICI MAXIMO TRIBUNICIA POTESTATE VII
CONSUL IIII,XIIII
et en bon français du XXIe siècle (si, si, il y a des personnes qui le parlent encore !)
A l'empereur César Titus Aelius
Hadrianus Antonin,Auguste Pieux
Père de la Patrie très grand pontife dans sa 7e puissance tribunicienne
consul 4 fois 14 mille pas
Vous noterez le raccourci
PPPMTRIB P VII
qui développé donne
PATER PATRIAE, PONTIFICI MAXIMO TRIBUNICIA POTESTATE VII
Un peu de calcul pour vérifier !
Lorsqu’on effectue des recherches historiques l’élément essentiel à ne pas perdre de vue est la véracité des faits et des relevés. Dans la recherche historique moderne depuis l’apparition de la photographie, nous avons des preuves irréfutables. Encore que, me direz-vous avec les actuels logiciels de retouche photographique ou la subtilité d’un angle de prise de vues nous démontre le contraire. La « une » de grands journaux français, faisant apparaître notre président de la République plus grand que son homologue d’outre atlantique, avait suscité quelques plaisanteries il y a quelques mois. Avant la photographie, la peinture avait eu recours aux pastiches également. Le sacre de Napoléon peint par David montrait clairement et en bonne place la mère de l’Empereur lors de la célébration alors qu’elle n’était pas présente ce jour-là. Pour l’époque romaine, pas de photo ni argentique ni numérique, des tableaux de peinture certes, mais allait-on demander à la pierre milliaire située à quatorze mille de pas du point zéro de la voie qu’elle jalonnait de prendre la pose. Que nenni ! Alors effectuons le calcul en prenant pour base le fait que ces pierres n’avaient pas de point d’origine commun comme l’a été le parvis de Notre-Dame-de-Paris pour les principales routes nationales de France. Les points zéro de ces voies romaines étaient en fait la plupart du temps les grandes agglomérations (exception faite de bornes monumentales symboliques : le milliaire d'or à ROME, point zéro de l'empire, ou peut-être la porte d'Auguste à NIMES). En ce qui nous concerne ce devait être Vienne.
Sortez les calculettes
14 000 pas X 1,48 m 20 720 m 20 km
J’arrive au terme de cet article, certes incomplet, sur l’histoire des bornes milliaires où d’autres sommités ont écrit de nombreux textes. Mais je pense déjà au prochain article voire peut-être fouille sur le terrain pour retrouver des signes incontestables du tracé de cette Via Agrippa. J’ai quelques indications dont j’attends la confirmation mais qui devraient permettre de trouver quelques belles dalles déposées il y a près de deux mille ans dans le périmètre de notre village sur ce qui naguère avait été que des chemins gaulois et encore bien auparavant des sentiers de chasseurs préhistoriques puisque des preuves existent de la présence de l’homme depuis plusieurs milliers d’années dans cette partie de la vallée du Rhône.
B.P.
Liens internet :
http://archeolyon.araire.org/Bornemil/index2.html
http://www.archaero.com/archeo161.htm#Sommaire